OMVS le journal N°04 Octobre 2008
Fleuve Sénégal: le pari tenu d'une gestion à quatre Djibril Sali est un ingénieur de classe exceptionnelle du génie rural. Il a occupé d'importantes fonctions administratives en tant que Directeur national des aménagements hydroagricoles et conseiller technique du Ministre du Développement rural. Affecté à l'Omvs, il dirige le Direc – tion de l'infrastructure puis coordonne le Projet de Gestion Intégrée des Ressources en eau et de l'Environnement du Bassin du fleuve Séné– gal. Son parcours fait de lui l'un des plus grands spécialistes africains dans le domaine des aménagements hydroagricoles et de la Gire, ainsi qu'un témoin privilégié de l'histoire de l'Omvs. «La gestion du Fleuve est adossée aux valeurs fondatrices de l'OMV5 : solidarité, équité, paix». Aujourd 'hui grâce à la gestion concertée de la ressource , quels bénéfices chaque Etat tire-t -i1 de ! l'Omvs ? Les bénéfices que tirent les Etats de la gestion concertée de la ressource sont multiples. La garantie d 'avoir toute l'année de l'eau douce, pour l'alimentation des populations, du bétail. les cultures irriguées (A c e jour, la superficie aménagée au Mali, en Mauritanie et au Sénégal est estimée à 140.653 ha, soit seulement 37,51 % des 375.000 ha . 72 353 ha ont été exploités en 2006/2007 soit 51 ,44 % des superficies aménagées) -la production électrique -la régénération et la conservation de l'écosystème -création d'un environnement écono– mique favorable et incitatif. Des outils pour une répartition équita– ble et une gestion durable et concer– tée des eaux du fleuve ont été mis en place. Quels sont les manquements actuels ? Les nouveaux enjeux ? Il faut d'abord rappeler ces outils que sont: Pour le barrage de Diama, nous avons le modèle courbe de remou de Diama (Corédiam). Pour Manantali les modèles Simulsen, Progéman. Le modèle de base de données hydroaccès est également utilisé et le tableau de bord Ressources/Emploi. Je ne pense pas qu'on puisse parler de manquements actuels. peut être d'insuffisances qui avec le temps, grâce aux ouvrages de deuxième génération. les projets en cours (PGIRE, PAS. Amélioration des cultures irriguées. transport multimodal) pour– ront être comblées. Les nouveaux Enjeux. sont la réa lisa- 1 tion des ouvrages de deuxième génération (Félou, Gouina. Gourbas– si) , les ouvrages de Koukoutamba, ! Bouréya. Balassa, dans la partie gui- 1 néenne du Haut Bassin. la définition d'une politique énergétique commu- 1 ne, d 'une politique agricole commu– ne. Réaliser le projet de transport mul– timodal qui permettra le désenclave– ment du bassin du fleuve Sénégal 1 facilitant ainsi la fluidité des échanges 1 commerciaux et le déplacement des populations. Amener notre organisa– tion à un autre pallier de coopération 1 à savoir l'int égration économique. 1"\ 1\ il' T ('1 1 certaines contraintes liées à certains financements, du projet hydro-élec– trique de Manantali, la décision fut prise de créer pour chacun des barra– ges une agence sous forme de Socié– té : la Société de Gestion et d'Exploi– tation du Barrage de Diama (Soged) , la Société de Gestion de l'Energie de Manantali (Sogem). La Sogem, Socié– té de patrimoine a signé un contrat d 'exploitation avec Eskom- SA. Manantali filiale d'Eskom d'Afrique du Sud. Voilà les structures qui ont en charge présentement la gestion des ressour– ces au niveau du fleuve Sénéga l. Racontez-nous également comment les structures ont été créées pour gérer la ressource. D'abord la première structure char– gée de la gestion de l'eau depuis la création de l'Omvs est le Haut Com– missariat de l'Omvs appuyée en cela par la Commission Permanente des Eaux. Dans la Convention relative aux ouvrages communs il est stipulé : <da gestion des ouvrages communs est confiée à des agences de gestion placées sous la tutelle de l'organisa– fion». Donc à la mise en service des barra– ges de Diama et Manantali dans une phase transitoire de gestion, il a été créé une Cellule provisoire d'exploita– tion des barrages au sein du Haut Commissariat de l'Omvs chargée de coordonner les activités des structures provisoires d'exploitations des barra– ges de Diama et de Manantali. En 1992, l'Ornvs lança une étude pour créer une agence de gestion des ouvrages communs (Agoc) malheu– reusement qui n'a pas connu de suite. En 1997. sur recommandation des bailleurs de fonds compte tenu de Vous savez au niveau des Etats il y a que les intérêts qui priment, mais dans le cas de l'Omvs, à chaque fois qu'il y avait un problème, grâce au dialo– gue, on arrivait toujours à un consen– sus aidé en cela par les Partenaires au développement. La particularité au niveau de l'Omvs c 'est d 'avoir très tôt mis en place un Comité Consultatif des Bailleurs de fonds qui a accompa– gné l'Organisation depuis sa création sur tout ce qu'elle a entrepris en lui apportant une assistance technique et financière. Les Bailleurs de fonds ont souvent joué le rôle de facilitateur entre les Etats. __L La réalisation des Infrastructures pour la maîtrise de l'eau a été le premier grand chantier de l'Omvs. A l'époque com– ment se sontfaits les choix, notamment pour Dlama et Manantall ? A-t-Il été difficile de se mettre d'accord ? En effet, les premières infrastructures réalisées par l'Omvs ont été d'abord les barrages de Diama et de Manan– tali suivi quelques temps après des endiguements rive droite et rive gau– che. En ce qui concerne les choix, notam– ment, de Diama et de Manantali, il faut remonter aux premières études faites sur le bassin qui avaient identifié plusieurs sites de barrages. En Amont il y avait Galougo, Bakel. Grand Goui– na, Petit Gouina, Manantali et en aval Diama, Dagana. Le choix de Diama et de Manantali a été fait sur la base de critères Technique , environnemen– tal. socioéconomique, financier et politique. gre toutes ces nouvelles dispositions. C'est cette charte avec ses annexes relatives aux scénarios d'aménage– ment et aux manuels de gestion des barrages qui définissent aujourd'hui les principes et modalités de gestion des eaux du fleuve Sénégal. Tout le dispositif de gestion du fleuve est adossé aux valeurs fondatrices de l'Omvs : Solidarité, équité. paix . Elles commandent toute la vision de l'Or– ganisation qui s'appuie sur la mise en commun des efforts et le partage des bénéfices. Pour illustrer cette vision j'aime à évoquer le fait que les gran– des infrastructures réalisées à ce jour par l'Omvs sont des «Ouvrages com– muns». c 'est-à-dire qu 'ils constituent des propriétés «communes et indivisi– bles» des Etatsmembres , quel que soit leur emplacement. Pouvez-vous nous présenter les princi– pes et les spécificités de la gestion des eaux du fleuve Sénégal ? A vant l'avènement des barrages de Diama (1986) et de Manan– tali (1987) l'utilisation des eaux du fleuve Sénégal était exclusivement tributaire de la crue naturelle. En dehors de l'alimentation en eau des populations et du bétail. la seule acti– vité était l'agriculture pratiquée en hivernage (cultures irriguées, cu ltures de décrue) . En saison sèche, la lan– gue salée remontait en aval de Saint Louis jusqu'à peu près 300 km aux environs de Podor et Boghé . ce qui excluait pendant cette période toute activité agricole. Il est même arrivé à partir de 1983, pour sécuriser les cultures et le remplis– sage des cuvettes (Lac de Guiers, Rkiz...[. que les Etats du Sénégal et de la Mauritanie érigent au droit du villa– ge de Kheune une digue en terre pour arrêter la langue salée. Voila la situation qui a prévalu avant la mise en service des barrages. Avec la mise en service des barrages, 3 objectifs principaux devaient être satisfaits à savoir l'irrigation de 375 000 ha, la production énergétique de 800 Gwh garantie 9 années sur 10,la régu– larisation du fleuve en étiage avec un débit de 300 m3/s permettant ainsi de pratiquer la navigation en toutes sai– sons. Il faut rappeler également qu'à sa création, l'Omvs est régie par les Conventions, notamment, la Conven– tion relative au Statut du fleuve Séné– gal qui déclare le fleuve «cours d'eau international» et définit également les principes d'utilisation des eaux du fleuve Sénégal. Cette Convention stipule ce qui suit : «Aucun projet susceptible de modifier d'une manière sensible les caractéris– tiques du régime du fleuve, ses condi– tions de navigabilité, d'exploitation agricole ou industrielle, l'état sanitaire des eaux, les caractéristiques biolo– giques de sa faune ou de sa flore, son plan d'eau, ne peut être exécuté sans avoir été au préalable approuvé par les Etats contractants après discus– sions, et justifications des appositions éventuelles». Pour son application, il a été mis en place la Commission permanente des Eaux (Cpe) qui est un organe perma– nent consultatif du Conseil des Minist– res. Chemin faisant, après dix ans d'expé– rience de gestion des barrages, les Etats membres en ont tiré des ensei– gnements qui les ont amené à procé– der à la relecture des conventions de base et également tenir compte de certaines dispositions de la Conven– tion des Nations Unies sur les Eaux Internationales adoptée en 1997, des recommandations de la Conférence des Nations Unies sur le développe- 1 ment durable de 1992, du Concept . de la Gestion Intégrée des Ressources en Eau (Gire) pour élaborer une Char– te des Eauxdu fleuve Sénégal qui intè-
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